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Au pays des chamois et bouquetins

 

 

13 décembre 2003 - Vallée de Champoléon (Hautes-Alpes)

8h00, il commence à faire jour. La lune était pleine voici quelques jours. Pour l'heure, il est temps pour elle de se coucher. Elle disparait derrière les mélèzes perchés sur cette crête. Un chamois curieux, s'approche en lisière, Vient-il lui souhaiter une "bonne nuit", ou pour venir nous saluer et nous accueillir sur son territoire ?
Pour nous, l'objectif du jour est d'observer les bouquetins, qui en cette période de l'année doivent être en plein rut. Le secteur est porpice, puisqu'ici est un de leur site d'hivernage dans la région. La neige tombée précocement cette année n'a pas résité au redoux et aux pluies dilluviennes de ces dernières semaines. Si bien qu'en versants sud, elle ne se trouve que vers 2000 mètres.
La lune se couche et le soleil se lève. Ce n'est pas encore aujourd'hui que le soleil a rendez-vous avec la lune.
Les cimes les plus hautes commencent à s'éclairer, et la vallée à se réveiller. Les cheminées des fermes fument.


En bordure de route, mésanges charbonnières et rougegorges sont déjà en pleine activité. Quelques minutes à suivre à la jumelle le cheminement du sentier, et déjà nous savons qu'il faudra être attentif : dans les pierriers se trouvent de nombreux chamois.
Le parking est désert. Nous empruntons le sentier pour nous rendre sur le site choisi. Les premiers mètres grimpent raide, puis rapidement le tracet s'assagit, et la pente se fait plus douce. Nous longeons une vire rocheuse humide, et un oiseau décolle du sol pour se poser un peu plus loin : un picvert. Une bande d'une vingtaine de chardonnerets traverse le ciel. Un petit oiseau gris un peu plus loin longe les rochers humides. Un tichodrome, au long bec fin et arqué papillonne à la recherche d'insectes dans les fissures humides. Le soleil qui semblait vouloir pointer son nez s'est ravisé, et le ciel est envahi de fins nuages d'altitude. Heuseusement que marcher nous réchauffe. Au dessus de nous, un chamois semble nous accompagner, il se déplace dans le même sens que nous, à la même vitesse. Agréable compagnie. En contre-bas, un autre, par contre, celui-ci ne semble pas forcement apprécier notre compagnie. Le voilà qui détalle, et dévalle comme un fou le pierrier. Puis le remonte d'un pas alter, rejoint le sentier, le traverse, et poursuit sa monté à une allure très soutenue. Impossible de chercher à avoir la même condition physique qu'eux. notre coeur n'est pas aussi developpé que le sien, et nos muscles ne sont pas autant oxygénés. Tant pis, il faudra se contenter de l'admirer et l'envier de grimper ainsi.
Nous traversons une coulée de neige, qui confirme bien que la neige était tombée en abondance il y a quelques semaines. Régulièrement, nous jumellons à la recherche des bouquetins. Mais ce ne sont "que" des chamois que nous trouvons.

Un petit ruisseau coupe le sentier. Problème : il est gelée. Il faut le traverser avec précaution afin d'éviter toute glissade. Nous voici sur le plateau. Il est traversé par un torrent, qui malgré le froid est encore relativement bien alimenté. Ici encore les bords en sont gelés. Les abords du plateau présentent de petites zones humides et nombreux suintements. Sous l'effet du froid, ces derniers se sont transformés en stalagtites de glace.
De l'autre côté, un chamois est en train de s'alimenter. Il arrache quelques graminées et autres végétaux secs, qu'il mache ensuite consciencieusement. Une observation attentive de l'animal nous indique qu'il s'agit d'un mâle. Il ne nous semble pas en super forme. Son poil n'est pas aussi sombres que les autres observés en montant, et le tour de son oeil n'est pas entouré comme habituellement d'un cercle occulaire pâle. A-t-il une maladie aux yeux ? Autre indice qui nous suggère ce problme, c'est qu'il arrache principalement des végétaux assez épais, principalement des tiges sèches de taille équivalente aux tiges des grandes gentianes jaunes.
Le versant de l'autre côté doit être plus ensoleillé, car moins enneigé, et donc plus favorable à cette grande faune de montagne. Nous cherchons un passage pour traverser le torrent. Plus loin, nous découvrons une superbe cascade Le pied de la cascade, qui ne voit pas le soleil, est couvert de glace.
Au bord du plateau, un chamois, un autre rumine paisiblement. Ce n'est pas le même que le précédent car celui-ci possède de beaux cercles orbitales bien clairs. Il se détache, illuminé, en opposition au versant ubac encore dans l'ombre de l'autre versant de la vallée.
Conscienscieusement, nous passons au peigne fin les environs. Mais aucun bouquetin n'est visible. Un peu partout des chamois : ici une femelle, couchée sur un névé au côté de son jeune. Un peu plus haut, un beau mâle fait des galippettes dans la neige, faisant voler des particules de neige à chacun de ses sauts.

Il est déjà plus de 14h00, et le soleil commence déjà à descendre sur l'horion. Encore peut-être une heure, et nous serons plongé dans l'ombre des hauts sommets nous entourant. Sur une crête nous surplombant, il me semble voir une forme qui n'était pas là tout à l'heure. Et oui, un splendide mâle bouquetin, très sombre, avec d'immenses cornes. Il fait face au vide, et semble nous regarder, 400 mètres plus bas. Il fait quelques pas en arrière et se retourne lentement, et se présente en silhouette sur fond de ciel bleu. Il n'a pas de marque auriculaire sur l'oreille droite. Ces cornes sont énorme. Elles doivent peser près de 5 kilos la paire. Au vu de sa stature, ce doit être un individu assez agé, et malgré l'absence de marque, il est possible que ce soit un des 14 mâles relachés en 1995-1996 par le parc national des Ecrins dans le Champsaur.
Dans la demi heure suivante, nous le verrons à nouveau, revenir au même endroit, à nouveau quelques minutes, puis disparaître définitivement. Visiblement, c'est plus interressant de l'autre côté.
Plus tard encore, vers 15 heures, quelques mètres sous le sommet des Bausias, nous arrivons à trouver dans la longue-vue, un second mâle bouquetin. il semble encore plus agé que l'autre. Sa paire de cornes est si grosse qu'il semble avoir du mal à soutenir sa tête. Ils doivent avoir le cou sacrément musclé. Sa corne gauche est émoussée : elle n'est pas aussi pointue que l'autre. Et surprise, son oreille gauche est pourvue d'une plaque verte. Cette fois ci c'est sur, il s'agit d'un bouquetin réintroduit en 1995 ou 1996. Après de longues minutes immobiles, il se retourne, et nous montre son flanc gauche, et là aussi, sur l'oreille gauche, une plaque : une verte. Grâce à ces 2 plaque colorée, nous savons qu'il s'agit de Vanoise, un bouquetin né en 1991, capturé à Aussois le 19/05/1995, et relaché le lendemain. A l'origine, il était muni d'un collier émetteur rouge qu'il a perdu durant l'hiver 2000/2001 entre le 24/12/2000 et le 05/01/2001 (info B. Thomas - PNE)

Le soleil a disparu derrière les montagnes depuis déjà près d'une heure. Autant tout à l'heure, au soleil nous avions chaud, autant maintenant, il nous faut enfiler des épaisseurs de vêtements supplémentaires. Encore une heure, et nous serons plongé dans la complète obscurité. Derniers coups d'oeil dans la longue-vue. Sur l'autre versant, devant nous, un bouquetin, un mâle adulte beaucoup plus jeune, qui doit avoir environ 4 - 5 ans, au vue de la taille des cornes. Il descend, solitaire, d'un vallon suspendu, et arrive sur le sentier que nous empruntions ce matin pour monter. Lui aussi le remonte lentement. Lentement, mais surement, il progresse dans notre direction. Le voilà maintenant devant le torrent. Celui-ci est franchi d'un bond agile. Quelques minutes, il disparait derrière une ondulation de terrain, et re-apparait au pied de l'éboulis, à une cinquantaine de mètres de nous. Il le traverse en diagonale,tout en continuant à monter. Enfin il arrive dans l'alpage, c'est tout juste s'il a regardé dans notre direction, lorsqu'il est passé à moins de 30 mètres de nous. Et il a continué sa route changeant de vallon.

Curieusement, sur les flancs, au niveau des pattes avant, son poil est blanc. Autre aspect étrange, durant tout son déplacement, il avançait la queue relevée, montrant une tache blanche bien visible sur son arrière train, un peu comme le miroir des chevreuil.

16h45, vite il nous faut remballer notre matériel, car il nous faut encore au moins 3/4 d'heure pour descendre, et nous avons 2 obstacles de taille à franchir. Il vaudrai mieux les passer tant que l'on y voit encore un peu. Cela ne nous empêche pas de nous arrêter encore quelques minutes pour admirer les sommets se parant de couleurs roses et mauves, signe que demain sera encore une belle journée.
Au cours de la descente, nous surprendrons quelques chamois, à proximité du chemin qui détallerons avec fracas à notre passage. Ils ne doivent pas être habitué